1939-1943 PDF Imprimer
La Guerre de 39-45

 

 

Un chocolat chez Hanselmann de Rosette Loy.

"Après, il n'avait pas voulu parler de lui. Même pas de ce mois d'août 1942 quand il s'était retrouvé à Marseille devant l'hôtel Bompard pendant que la police française embarquait les femmes et les enfants pour les déporter au camp des Milles.

Ce matin d'août 1942, il s'était retrouvé devant le cordon de policiers qui barrait l'accès à la rue de l'hôtel Bompard. Dans l'hôtel, des femmes et des enfants étaient enfermés, essentiellement des juives allemandes et des pays de l'Europe de l'Est. C'était un lundi…

Ils étaient entrés en contact avec les Eclaireurs israélites de France et l'O.S.E., un organisme juif de secours à l'enfance…La mère avait été transférée à Drancy, en zone occupée…Ensuite, ils s'étaient adressés à l' H.Y.C.E.M. qui était un organisme international moins vulnérable à ce moment-là".



Aldo et Sarah de Nicole Ciravegna.

"La rue des Flots Bleus, c'est un joli nom, remarqua Sarah d'une voix heureuse. Je n'aime pas cette rue dit la petite Rose. Elle me fait peur. Sarah vit une adorable rue toute blanche sous le ciel bleu. On devinait de beaux jardins derrière les murs et les toits roses des villas mettaient des lueurs d'aurore entre les branches des pins qui dépassaient le mur. La rue était paisible comme un tableau.

Ecoute, dit la petite. Une rumeur leur parvint, confuse, impressionnante. C'était le vacarme sourd et rauque que ferait une foule enfermée dans une prison. Sarah aperçut alors, presque au bout de la rue des Flots Bleus, l'unique et insolite immeuble de ce quartier de villas…

Quand Sarah et l'enfant ne furent plus qu'à une centaine de mètres, ce fut le déchaînement. Toute la maison hurlait avec des pleurs, des cris et des appels. Aux fenêtres les têtes s'agitaient, des bras jaillissaient et faisaient des signes éperdus. Un carré de papier fut jeté par l'une de ces mains désespérées et il descendit en voltigeant le long de la façade. Sarah s'élança, le regard fixé sur le papier que le vent écartait du mur. Elle tendit la main vers lui, et poussa un cri : de la maison sortait en trombe un Allemand, la mitraillette au poing. Un énorme chien la heurta. Derrière elle, un bruit de bottes galopa sur le trottoir, puis un autre retentit sur sa gauche. En quelques secondes elle était cernée par trois sentinelles. Elle s'arrêta affolée. Toute la maison au-dessus d'elle hurlait. Sur le trottoir, le petit papier blanc. L'Allemand à la mitraillette la ramassa. Sarah sentait contre ses jambes le souffle chaud du chien. L'Allemand déchira le billet, jeta les débris par terre et les racla avec sa botte jusqu'à ce qu'ils soient émiettés, écrasés dans la pierre du trottoir. Puis il haussa les épaules et rentra dans l'hôtel. Alors le hurlement de toutes les fenêtres tomba sur elle comme un tourbillon. La petite fille se mit à pleurer. Sarah courait, seule au monde, avec ce cri à ses trousses, dans une rue de cauchemar…les villas heureuses avaient disparu, englouties derrière  ces murs terrifiants, blancs comme des sépulcres."
L'auteur a utilisé les souvenirs d'enfant de R. Malerba, professeur comme elle au collège Michelet.

 

Les Juifs français

Au delà de l'Histoire et des nombreuse lois anti-juives qui se succèdent entre 1940 et 1944, les habitants se souviennent des histoires vécues au sein même de notre quartier : calvaire des familles juives, actes de solidarité des voisins, des enseignants.

Mr et Mme Ben Saudo tiennent la chemiserie "Le Gaspilleur" rue d'Endoume. Lorsqu'ils sont arrêtés, leurs deux plus jeunes enfants fréquentent le pensionnat Ste Thérèse de Lisieux, rue Aicard ; aux policiers français venus les chercher Mlle Ventujol répond qu'ils sont absents ; elle les cache un certain temps. La fille aînée, élève à la rue de la rue Clothilde est aussi protégée par la directrice de cette école, mais sachant sa famille détenue, elle craque et va se livrer aux bourreaux.

Mr Malafré agent de police, informé de la grande rafle qui se prépare, prévient à temps ses voisins, Mr et Mme Pariante qui peuvent fuir le 19 rue Berle par les jardins.
Note : une dénonciation de Juif rapporte "la carlingue" à son auteur càd 800 frs (le salaire d'un policier est alors de 1800 frs).

Mr Gallorini, complète les maigres revenus de son épicerie 39 bd Bompard, par des travaux de jardinage impasse de la Lune, lorsqu'il entend des murmures derrière les feuillages ; il s'approche doucement et saisit quelques mots en italiens. Sa connaissance de la langue lui permet de converser avec le couple juif caché dans une grotte derrière un rideau de lierre, et qui espère avec ses pièces d'or se procurer un prochain passage vers l'Amérique.